Modification d’objet social : toutes les formalités à accomplir
Une entreprise n’est pas figée : elle est amenée à évoluer. Dans certains cas de figure, cette évolution nécessite de procéder à un changement de son objet social, notamment lorsqu’il s’agit d’exercer une activité différente ou d’étendre ses activités existantes. Une procédure qui suppose de remplir un certain nombre de formalités obligatoires, et de tenir compte des conséquences à la fois sociales et fiscales. Dans cet article, Keobiz vous propose de suivre pas à pas le processus de modification de l’objet social d’une société, qui consiste à retoucher les statuts, à rédiger un PV et à publier une annonce légale, avant d’acter le changement auprès du greffe du tribunal. Vous y découvrirez également les répercussions fiscales et sociales à anticiper.
En résumé :
- L’objet social désigne l’ensemble des activités exercées par une société. Il doit être modifié lors d’un changement complet d’activité ou lors de l’adjonction d’une activité secondaire différente de la principale.
- Un changement d’objet social correspond à une révision des statuts. Il faut réunir les associés en assemblée générale, rédiger un PV, publier une annonce légale et déclarer la procédure via le Guichet unique.
- L’enregistrement d’un nouvel objet social engendre des conséquences fiscales et sociales.
Dans quels cas doit-on changer l’objet social d’une société ?
Avant d’entrer dans le vif du sujet, il faut comprendre ce qu’est un objet social de société et dans quels cas il est nécessaire de le changer.
Qu’est-ce qu’un objet social ?
Ce terme désigne l’ensemble des activités qu’une personne morale (société ou association) peut exercer une fois achevées ses formalités de création : activités principales, bien entendu, mais aussi secondaires, connexes ou complémentaires.
Cet objet, qui permet d’identifier l’activité de la structure, est obligatoirement inscrit dans ses statuts, au sein d’une clause spécifique. Il détermine le code APE (qui définit la branche d’activité principale), la convention collective dont dépend l’entité, la nature de l’activité – selon qu’elle est commerciale, libérale, artisanale ou agricole – ainsi que les taux de charges sociales et le régime d’imposition applicable. Il permet enfin de définir l’étendue des pouvoirs des dirigeants, avec la possibilité de voir leur responsabilité engagée si les activités exercées excèdent le cadre de l’objet social.
En somme, l’objet social donne à une société son identité intrinsèque. Celle-ci ne peut pas exercer une activité qui n’est pas explicitement mentionnée dans les statuts. C’est pourquoi sa rédaction doit être prise au sérieux.
Il est recommandé de rédiger un objet social de manière suffisamment large pour ne pas restreindre les activités de la société, ce qui conduirait à une actualisation trop fréquente des statuts. Dans le même temps, cette description doit rester assez claire et précise pour que l’immatriculation de la société soit acceptée par le greffe.
Quand doit-on modifier l’objet social ?
Or, les activités d’une société peuvent être amenées à évoluer, auquel cas il devient nécessaire de procéder à une modification de l’objet social. Cela arrive dans deux cas de figure :
- Pour développer une nouvelle activité sans rapport avec l’activité principale (une activité secondaire, connexe ou complémentaire). Exemple : vous avez un salon de coiffure et souhaitez pouvoir vendre des boissons chaudes en complément.
- Lors d’un changement complet d’activité, de sorte que l’objet social inscrit dans les statuts n’est plus adapté. Exemple : vous avez ouvert un magasin de vêtements que vous voulez transformer en pizzeria.
Si l’activité secondaire ajointe à l’activité principale entre dans le champ de l’objet social, il n’est pas nécessaire de le changer : une mise à jour du Kbis suffit.
Comment procéder à une modification d’objet social ?
Une procédure de modification de l’objet social s’apparente à un changement dans les statuts de la société. Par exemple, une modification des statuts de SARL est nécessaire lorsqu’il s’agit de transférer son siège social, de procéder à sa dissolution-liquidation volontaire, de choisir une nouvelle dénomination sociale, ou encore d’intégrer l’identité du nouveau dirigeant après la démission du gérant de SARL (lorsque le nom de ce dernier est mentionné dans les statuts). À chaque fois, la décision de modification doit être prise par les associés ou les actionnés réunis en assemblée générale et indiquée dans un procès-verbal, puis faire l’objet d’un avis dans un journal d’annonces légales (l’attestation de parution faisant foi) et d’une déclaration au greffe du tribunal via le guichet unique des formalités des entreprises. C’est d’autant plus important que le changement d’objet social est assimilé à une cessation d’activité (voir, plus bas, les conséquences sur le plan fiscal) et qu’il est donc essentiel de bien suivre les formalités.
Faisons le point sur les étapes à suivre pour effectuer ce changement d’objet social.
La convocation de l’assemblée générale
Dans la plupart des cas, il est nécessaire de convoquer une assemblée générale extraordinaire afin de faire approuver la décision de changement de l’objet social par les associés ou les actionnaires.
Contrairement à une assemblée générale ordinaire, convoquée chaque année à une date fixée dans les statuts pour prendre des décisions concernant la vie de la structure (comme l’approbation des comptes d’une association ou d’une société), une assemblée extraordinaire peut être tenue à n’importe quel moment lorsque des questions cruciales sont en jeu, comme le changement des statuts ou la dissolution de l’entité. Néanmoins, l’AGE doit aussi faire l’objet d’un procès-verbal.
Quelles sont les modalités décisionnelles pour changer l’objet social d’une société ?
- En SARL, la majorité à atteindre en AG dépend de la date de création de la société : la décision doit être adoptée par les associés qui représentent au moins trois quarts des parts sociales dans les SARL constituées avant le 4 août 2005, et deux tiers des parts sociales au-delà. Si la SARL ne comporte qu’un unique associé, c’est à lui seul d’en décider.
- En SAS, la décision est votée et approuvée selon les conditions de quorum et de majorité fixées dans les statuts. Elle peut être prise par les associés, par le président, ou par tout autre organe compétent désigné dans les statuts de la SAS.
- En SA, la décision doit être adoptée par la majorité qualifiée des deux tiers.
- En SNC et en SCI, la décision est prise à l’unanimité des associés, sauf si les statuts prévoient une majorité à atteindre.
- En SASU, le pouvoir est conféré à l’associé unique qui est aussi, le plus souvent, président de la société. Si les deux fonctions sont séparées, l’associé unique doit être convoqué par le président.
- En EURL, le changement d’objet social est du ressort de l’associé unique de la société.
- En entreprise individuelle, l’entrepreneur exerce en nom propre et prend donc seul la décision.
La rédaction d’un PV
Qu’une assemblée générale ait été réunie ou non, la décision de modifier l’objet social doit être mentionnée dans un PV. Celui-ci sert à démontrer que les modalités décisionnelles ont été respectées. Il doit indiquer :
- La date et l’heure de l’assemblée générale, l’organe à l’origine de la décision, ainsi que les modalités de convocation (le cas échéant).
- La résolution relative au changement d’activité.
- Le nouvel objet social.
- Une mention de la modification subséquente des statuts de la société.
La publication d’une annonce légale
Autre obligation à respecter : la publication d’un avis dans un journal d’annonces légales, afin d’en informer les tiers. Cette publication d’annonce légale doit être réalisée dans un délai d’1 mois à compter de la prise de décision. L’avis doit contenir plusieurs informations :
- La forme juridique de la société, sa dénomination sociale, son numéro Siren et l’adresse de son siège social.
- Le montant de son capital social.
- La mention « RCS » (Registre du commerce et des sociétés) et le nom de la ville du greffe où la société est immatriculée.
- Les modifications qui ont eu lieu : objet social ancien et nouveau.
- Le cas échéant : l’organe habilité à prendre la décision et la date de l’assemblée générale qui a été réunie pour l’occasion.
En cas de changement de l’objet social, les statuts de la société doivent ensuite être mis à jour.
La déclaration du changement d’objet social
Le moment est venu de procéder à la déclaration du changement auprès du greffe. Celle-ci doit être effectuée, dans un délai d’1 mois après la prise de décision, sur le Guichet unique à l’adresse suivante : https://procedures.inpi.fr/?/.
Rappelons que toutes les formalités relatives à la vie de la société se déroulent sur le Guichet unique depuis le 1er janvier 2023, et non plus auprès du centre de formalités des entreprises. C’est vrai pour la création de l’activité, pour sa cessation, pour la modification des statuts, et donc pour un changement d’activité. Si vous souhaitez attribuer un nouvel objet à une SCI, par exemple, il n’est plus nécessaire de compléter le formulaire M2 : tout se fait en ligne, y compris l’attachement des pièces justificatives (à l’image du procès-verbal et de l’attestation de parution de l’avis).
Votre dossier doit contenir les pièces suivantes :
- Le PV de modification de l’objet social.
- Un exemplaire des nouveaux statuts mis à jour (datés et certifiés conformes par le représentant légal).
- Une attestation de publication de l’annonce légale.
- Un justificatif approprié en cas d’activité réglementée (copie de diplôme, de titre ou d’autorisation d’exercer).
Notez que cette procédure donne lieu à une insertion automatique au Bulletin officiel des annonces civiles et commerciales (Bodacc), qui rend la modification de l’objet social opposable aux tiers.
Peu de temps après la déclaration, vous recevez un Kbis mentionnant la nouvelle activité de votre société.
Quels sont les coûts à prévoir ?
Pour un changement d’objet social, il faut prévoir la somme de 192,01 € (en 2024). Le paiement se fait en ligne, dans la foulée des formalités. À cela, vous devez ajouter les frais de publication d’annonce légale, qui s’élèvent en moyenne à 150 €, et au besoin les frais de service si vous avez choisi de déléguer ce processus à un professionnel, par exemple à votre expert-comptable.
Quelles sont les conséquences d’un changement d’objet social ?
Il est important de garder en tête que la procédure de changement d’objet, pour une société, est suivie de conséquences fiscales et sociales. Quelles sont-elles ?
L’impact fiscal
Du point de vue de l’administration fiscale, un changement d’objet social qui relève d’une activité entièrement nouvelle s’apparente à un arrêt définitif de l’activité. Avec deux conséquences directes :
- L’imposition immédiate des bénéfices tirés de l’activité en cours (et qui n’ont pas encore été taxés), des bénéfices en sursis d’imposition (les provisions constituées en franchise d’impôt et les plus-values qui relevaient d’une imposition différée), et des plus-values sur les éléments de l’actif immobilisé ayant été réalisées ou constatées lors du changement.
- La perte du droit du report des déficits subis en amont de la modification (pour les entreprises soumises à l’impôt sur les sociétés).
Ce faisant, vous devez déposer une déclaration de résultat auprès du service des impôts des entreprises (SIE) dans les 60 jours qui suivent le changement.
La société peut malgré tout bénéficier d’un sursis d’imposition si aucune modification n’a été apportée aux écritures comptables, et si l’imposition des bénéfices, des plus-values et des profits sur stock demeure possible suite au changement.
L’impact social
Le changement d’objet a également des conséquences sociales à plusieurs niveaux :
- La nouvelle activité (donnant lieu à l’attribution d’un code APE différent de l’ancien) est susceptible de relever d’une autre convention collective ou d’un accord de branche différent. Elle donne lieu à une modification de la législation sociale applicable.
- Le régime d’affiliation des dirigeants de la société peut être modifié si l’activité relève d’une autre catégorie (par exemple, si vous passez d’une activité commerciale à une activité libérale).
Le cas échéant, prêtez une attention particulière à l’impact social éventuel de votre passage d’une activité à une autre.
Comment changer l’activité principale d’une société ?
Changer l’activité principale d’une société en revient à modifier son objet social. La procédure nécessite de suivre plusieurs étapes :
- Convocation d’une assemblée générale extraordinaire pour que les associés ou actionnaires adoptent le changement d’objet.
- Rédaction du PV mentionnant la modification décidée.
- Mise à jour des statuts avec la nouvelle activité.
- Publication d’un avis dans un journal d’annonces légales.
- Déclaration en ligne via le Guichet unique.
- Transmission d’une déclaration de résultat à l’administration fiscale.
Comment bien rédiger son objet social ?
Il est essentiel de rédiger avec soin l’objet social de l’entreprise. Voici quelques conseils :
- Rédigez un objet social aussi précis et clair que possible, en englobant l’ensemble des activités de la société. L’administration est en droit de rejeter un objet trop vague.
- Veillez à ne pas restreindre les activités de la société, afin de laisser de la marge si vous souhaitez plus tard ajouter une activité secondaire, connexe ou complémentaire.
- Respectez les règles de rédaction imposées pour certaines professions réglementées : la formulation de l’objet social est alors encadrée.
- Faites-vous aider par des prestataires professionnels.
Quand faut-il modifier l’objet social d’une société ?
Il est nécessaire de modifier l’objet social d’une société dans deux cas de figure :
- Pour adjoindre une activité secondaire, connexe ou complémentaire, qui est sans rapport avec l’activité principale.
- Pour effectuer un changement complet d’activité, de sorte que celle-ci ne correspond plus à l’objet social indiqué dans les statuts.
Quelle est la différence entre objet social et activité ?
L’objet social et l’activité de l’entreprise renvoient à deux réalités différentes. L’objet social englobe toutes les activités exercées par la société, telles que décrites dans ses statuts : activité principale, mais aussi activités secondaires, connexes ou complémentaires. L’activité, elle, est exercée au sein d’un établissement de la société : elle est inscrite sur le Kbis délivré par le greffe. Elle doit toutefois être conforme à l’objet social, défini de manière très large.
Sources
- Changer l’objet social de la société : https://entreprendre.service-public.fr/vosdroits/F36182 + https://www.infogreffe.fr/guide-des-formalites/registre-du-commerce/modification/changement-relatif-a-l-activite/modification-de-l-activite-avec-changement-de-l-objet-social
- Différence entre objet social et activité : https://www.exprime-avocat.fr/avocat-droit-des-societes/creer-une-entreprise/comment-choisir-lobjet-social-de-sa-societe/
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